Le vent a soufflé toute la
journée, soufflé à perdre haleine. Ce soir encore il s’élance, se tordant en
rafales, racle les toits de ses tentacules déchaînés, s’écrase au pied des murs
et remonte de plus belle à l’assaut des maisons, grondant, tournoyant,
effrayant. Les pins parasols se penchent un peu plus et le marronnier presque
complètement dénudé lutte courageusement ; ses branches en squelettes
tragiques se tendent, implorant la clémence du monstre. Mais celui-ci n’entend
rien, assourdi par son propre vacarme. Sa force terrifiante s’engouffre dans les
rues, soulève violemment les feuilles déposées au sol par l’automne, les
entraînant dans une ronde frénétique. Il s’éloigne, puis revient, s’acharne, plus menaçant encore, chassant de son chemin les rares téméraires qui osent le
braver. Sa colère redouble en tourbillon mugissant. Rien ne l’arrête,
insensible, infatigable, il continue sa folle sarabande jusqu'à l’entrée de la
nuit. En franchira-t-il le seuil ? Se lassera-t-il enfin ?